« Les mondes perdus » – Des textes à découvrir


flaqueDu 18 novembre 2011 au 14 janvier 2012, la médiathèque de Bourges organisait un concours de nouvelles ouvert à tous. Le 31 mars, étaient dévoilés les lauréats qui ont accepté que leur texte soit publié ici. Merci à eux de nous permettre de les découvrir !

Voici le 3ème prix dans la catégorie « groupe » des 13-17 ans :

Le monde de l’Oubli
Camille ALBOUY et Eléonore GRANDGIRARD

Journal !!! Plus personne ne me croit, j’en ai la preuve, je veux montrer à tout le monde que je ne suis pas un menteur. Pour cela il faut que je retourne à cet endroit…
Mais avant je vais te raconter ce qui m’est arrivé.
Comme tous les jeudis, en sortant du collège, je rendais visite à ma grand-mère.
J’aime beaucoup regarder de vieilles photos avec elle, je n’avais pas énormément changé, j’avais toujours ma chevelure blonde et mes yeux verts, j’avais également développé ma musculature ainsi que ma grande taille, seule mon imagination était inchangée.
Lorsque j’arrivai chez mamie, je fus surpris de constater qu’elle n’était pas là. Je décidai alors de me promener dans le quartier, j’aperçus dans le jardin de Mme Castilla un joli chien, un bouvier bernois, je crois, son poil était si long et si beau que je voulus le caresser. Il me regardait avec de grands yeux noirs, il paraissait étonné que je veuille le toucher, il n’était pas attaché. Tout à coup, il se rapprocha subitement de moi, puis il sortit les crocs, je compris alors qu’il fallait que je m’enfuie. Je pris peur, le chien me pourchassait. Je sautai des haies, pris tous les raccourcis que je connaissais, mais le chien continuait de me poursuivre. Brusquement mon pied glissa sur le trottoir, je m’écrasai à terre et mis ma main gauche dans une substance gluante. Mon bras fut comme aspiré par cette étrange flaque. Je n’en distinguais pas le fond, c’était une profondeur sans fin. La matière m’était complètement inconnue, c’était liquide mais je n’avais pas la sensation d’être mouillé. Je relevais la tête et vis le chien féroce foncer sur moi, ce qui m’obligea à me relever, puis je parvins à courir chez moi. Je voulus tout de suite tout raconter à ma famille. Je leur expliquai dans le moindre détail ce que j’avais découvert, puis mes parents me dévisagèrent, avant d’éclater de rire puis me dirent :
« Tu vas bientôt avoir quinze ans alors arrête d’inventer des histoires stupides !
– Non ! C’est faux, il faut que vous me croyiez, c’est la vérité !!!
– Ça suffit, nous ne te croyons pas, alors cesse de raconter n’importe quoi. Maintenant, va dans ta chambre, le sujet est clos. »
Journal ! Maintenant que je t’ai tout expliqué, il faut que je retourne dans cet endroit étrange où se trouve cette flaque. Il faut que je découvre ce qu’elle renferme, mais pour cela, je dois prendre le risque de ne peut-être jamais revenir ; alors ce sont peut-être mes derniers mots…
***
Je retournai à l’endroit où cette chose étrange m’avait aspiré le bras. Nous étions mardi, il était environ une heure vingt-cinq du matin, la nuit était glaciale, les rues désertes, et là je vis ce que j’étais venu chercher : la flaque. Elle était illuminée par les réverbères, on aurait dit qu’elle glissait vers moi, elle m’attirait, puis tout à coup elle disparut… Je balayai du regard les alentours, puis en un battement de cils elle réapparut. Elle se trouvait devant moi, j’eus un mouvement de recul, l’eau passa d’un bleu clair à un bleu sombre, attirant. J’approchai mon bras pour toucher l’eau, elle devint trouble et m’aspira brutalement.
La chute dura un temps indéterminé. J’avais la sensation que la notion du temps n’existait pas dans ce monde. Le paysage était stérile, presque mort, mais je ressentais une présence. Le sol était intriguant, il était fait de cristaux. On aurait dit qu’ils avaient des yeux, qu’ils m’appelaient au secours. Pris de panique, je me mis à hurler :
« Où suis-je !! » Puis une voix sadique, presque moqueuse, s’exclama : « Tu es dans un monde parallèle à celui des humains, tu es dans le monde de l’oubli… »
Je répondis « Mais qu’est-ce que c’est ? »… aucune réponse. J’entendis un bruit qui m’attirait et découvris une sorte de petit ruisseau, à base d’une substance luisante. Je m’en approchai et fus surpris d’y voir mon reflet, je le touchai, puis je fermai les yeux.
Je ressentais la présence de ma mère, j’entendais sa voix. Elle semblait heureuse comme jamais, son rire était doux et cristallin, je rouvris les yeux et à la place de mon reflet se trouvait le reflet de mes parents. A travers ce ruisseau, je les voyais, je voyais leur vie… sans moi. Ce qu’ils faisaient en ce moment même. Pourquoi ne me cherchaient-ils pas ? Pourquoi n’y avait-il aucune trace de mon passage sur terre ? Moi leur unique enfant. C’est là que je compris la signification de ce monde, le monde de l’oubli… J’avais résolu l’énigme, et subitement mon corps se recroquevilla, je devins cristal et je rejoignis toutes ces malheureuses personnes et me figeai dans le temps.

Photo publiée sur Flickr en licence Creative Commons par Marc Lagneau

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