La Solitude du docteur March / Geraldine Brooks
Belfond, 2010
Le Docteur March ? Oui le père de ses quatre filles… Souvenez-vous du roman de Louisa May Alcott : au début, le père laisse sa famille pour accompagner les troupes anti-esclavagistes pendant la guerre de Sécession. Je n’avais honnêtement aucun souvenir de la figure paternelle : j’avais gardé en mémoire la personnalité des filles et surtout celle de Jo la rebelle, celle qui allait devenir écrivain… Lecture adolescente – famille américaine bien pensante – hisoire sécurisante – chacun à sa place et les vaches sont bien gardées…
Donc « La solitude du docteur March » me tombe entre les mains à l’occasion de cette rentrée littéraire 2010. Un homme brave doublé d’un brave homme que l’on accompagne dans ses pérégrinations, réflexions et analyses : d’abord la rencontre avec la future mère de ses filles (après avoir, quand même frémi pour une belle esclave pendant son adolescence mais nous y reviendrons). « Ce n’était aucunement un visage que le monde conventionnel eût qualifié de beau. La joliesse n’y jouait aucun rôle… Mais l’effet général était tel que le mot qui me venait sans cesse à l’esprit était ‘noble’ : elle ressemblait à une aristocrate sous le pinceau de quelque peintre de cour ibérique. » Evidemment, ils se plaisent (c’est plus facile quand on est du même milieu social), se marient et ont de nombreux enfants. Un vrai conte de fées d’autant qu’ils partagent les mêmes valeurs… Pour faire vite, l’esclavage, c’est mal… La religion, c’est bien…
Et puis, départ à la guerre… Enflammé par ses propres discours et le soutien d’une jeunesse débordante, il décide – à plus de quarante ans – de s’engager aux côtés de ceux qui se battent pour l’abolition de l’esclavage. Récit de ces moments cruels où les atrocités succèdent aux exactions en tous genres (j’oubliais : la guerre, c’est mal… La religion, c’est bien…). Récit accompagné des lettres – incolores, inodores et sans saveurs – que ce cher docteur rédige à l’attention de sa chère femme et de ses non moins chères filles… Evidemment, il retrouvera la belle esclave de ses 18 ans, devenue infirmière hors-pair, assistante dévouée d’un chirurgien doté d’une grande humanité… Evidemment, ils seront tous deux, à nouveau troublés… Evidemment rien ne sera consommé… Une telle grandeur d’âme, une telle rectitude morale forcent notre admiration !!!
Ouf, la morale est sauve : le bon docteur retrouvera son bonheur familial, son épouse et ses quatre filles adorées. Tout est bien qui finit bien et bien entendu, notre héros sort grandi des épreuves auxquelles il a survécu…
Manichéen et conventionnel, « La solitude du docteur March » m’est tombé entre les mains à l’occasion de cette rentrée littéraire 2010 ou plutôt m’est tombé des mains ! Y-avait-il réellement nécessité à sortir de l’anonymat e père des quatre filles ???
Chronique rédigée dans le cadre du partenariat avec les Chroniques de la Rentrée Littéraire
Avec Père et sans reproches, donc;-)