Clare Wald, grande figure de la littérature sud-africaine, vient de répondre positivement à la demande d’un jeune journaliste, Sam Leroux qui souhaite retracer sa carrière dans une biographie.
Des entretiens bien mystérieux s’en suivront. Sam semble embarrassé par son sujet. Que cherche-t-il en filigrane des confessions qu’il soutire à la vieille dame ? Pourquoi celle-ci esquive certaines questions du journaliste ? Que cherche-t-elle à cacher sous le masque de la célèbre romancière, fidèle partisane des valeurs humanistes ?
Prodigieusement construit, ce premier roman s’articule autour d’une série de confessions portées essentiellement par trois voix. La voix de Sam qui, en partant des témoignages et réflexions de Clare, tente de recomposer une partie de sa propre histoire ; la voix de Clare qui en secret travaille à sa propre biographie. Douloureuse confession intime qui l’amène à enquêter sur Laure, sa fille, disparue lors de la lutte armée anti-apartheid de 1989. Les notes rapportées dans le carnet que la jeune fille tenait constituent cette troisième voix.
Clare et Sam entreprennent l’irréversible mais nécessaire quête vers la vérité. Comme une promesse d’absolution…? Absolution, ou comment vivre avec la culpabilité dévorante. Culpabilité fantasmée, pour expier ses fautes ? S’en acquitter ?
Quant à la vérité, chacun porte la sienne. Guidée par des projections et des convictions intimes, elle peut prendre des accents de trahison à l’égard d’autrui.
Un travail de mémoire se met en marche, en écho à celui qui s’opère dans le pays en plein post-apartheid (années 90). A l’heure des témoignages et confessions officielles pour faire la lumière sur la partie la plus sombre de l’Histoire de l’Afrique du Sud, Clare et Sam reviennent sur des secrets trop lourds à porter…
Énigmatique tout d’abord, le récit lève peu à peu le voile sur des histoires passées entremêlées, mais dont chaque protagoniste ne voit qu’une partie. A nous de le recomposer. Un roman polyphonique où l’entêtement de chacun à obtenir des révélations, dévoile une impuissance commune à « réparer » le passé.
L’atmosphère pesante se resserre sur les tourments de Clare et Sam, le passé qui les rattrape révèle aussi les cicatrices d’un pays qui n’en a pas fini avec la violence et la peur de l’autre.
Absolution est aussi un roman sur la littérature, comme exutoire face aux démons. La littérature comme distance salutaire face à l’oppression et à la violence. La littérature comme ré-invention du monde et qui fait dire à Clare, « Le langage fabrique le monde qui nous entoure et tout ce que nous rencontrons. Si j’appelle cela de la fiction, c’est de la fiction ».
La littérature qui permettra peut-être à Clare et Sam de se retrouver sur une terre pacifiée.