Bourges des lys


 A la mémoire de Marcel Bascoulard


« A Cœur vaillant, rien d’impossible. » (Devise de Jacques Cœur)

 

Le fier marchand de Bourges verse sa corne d’or sur la ville qu’il aimait. Son cœur et sa coquille ornent encore le blanc palais que le roi jalousait. Il le servit pourtant de ses écus, mais il trahit aussi la demoiselle qui le servit de son épée.

 

Aquarelle médiévale aux maisons de guingois où sautille le moineau des colombages, je trébuche sur le pavé du royaume des Lys et me perds dans le labyrinthe enchanté de tes ruelles fleuries de passeroses où œuvre encore peut-être, sous la cathédrale de lumière, l’alchimiste aux yeux d’émeraude.

 

Jean de Berry et son cortège chamarré d’insouciance, sortant des Riches Heures de son précieux palais, dans sa houppelande d’azur semée de lys d’or, Macée de Léodepart, la dame de Cœur, navrée de sa disgrâce, les chanoines satisfaits de la Sainte-Chapelle, plus belle, dit on, que celle de Paris, et qui n’est plus ; comme le dit le Roman de la Rose : « Tout se passe et rien ne dure, ne ferme chose tant soit dure. »… Maître Guillaume Pelvoysin, le très savant maître d’œuvre, Charles de Valois, septième du nom, avec son long nez morose sous son grand chapeau de velours pourpre et Louis le onzième, le rusé compère, riant de ses bons tours, Luther allumant l’incendie depuis la « Pierre de crie »… Hommes d’armes et échevins, jongleurs et cracheurs de feu, comédiens d’Italie, étudiants d’Allemagne, bouchers de la place Gordaine, marchands de la Halle au Blé, menu peuple de ce temps-là, se mêlent aux passants modernes.

 

Ville ajustée, à taille humaine, musicale et joyeuse, capitale éphémère et mille fois meurtrie, tu ne veux pas que l’on t’éveille du beau songe où tu t’assoupis sous le soupir d’une fontaine.

 

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