Le fils du printemps de Cristovao Tezza, Editions Métailié – 203 p.
Trad. du brésilien
Il est brillant, il est intelligent, il résiste au système et aux systèmes et revendique sa liberté.
Un jour, il sera un auteur très brillant. Mais dans l’immédiat, lui qui fuit les responsabilités, va être père. Et devenir père cela doit permettre de devenir adulte, de faire naître un sentiment de responsabilité, et nécessite de se prendre en charge intellectuellement et matériellement.
L’enfant est là enfin ; le moment qui fera de lui un père, le père. A présent, la place qui a été la sienne dans le berceau est occupée. Cet enfant qui aura un avenir brillant, dont le père est si intelligent sera l’avenir. Sauf que cet enfant qui ne peut être que brillant est atteint de trisomie. Malgré l’injustice de la situation, inutile de s’affoler les trisomiques ont une espérance de vie courte….et il pourra, lui, l’homme –ex-père, ainsi retrouver sa liberté. Mais la vie n’est pas ce qu’elle pourrait être dans son imaginaire. Et petit à petit en multipliant expériences collectives et individuelles, il va apprivoiser ce petit être jusqu’à l’apprécier et lui reconnaître des qualités.
Quand il réalisera que tout ne peut se passer comme lui le veut, il découvrira que la vie peut s’apprendre et que ce qui est parfois difficile sur le moment peut être un apprentissage du quotidien, de la vie sociale, de la tolérance et des sentiments. Cet homme qui n’a ni nom, ni prénom se retrouve confronté du jour au lendemain à la réalité, pas celle qu’il créé au jour le jour mais celle de tout un chacun avec ses joies, ses contraintes ses déceptions et ses plaisirs, aussi petits soient-ils. Et puis au final, c’est son fils et quand bien même il ne sera jamais le génie attendu, et sans pour autant tout à fait se résigner, il l’accompagnera tout au long de sa vie et s’adaptera à cet enfant devenu adulte immature (se reconnaît-il en lui) jusqu’à partager des moments de complicités et l’aimer.
Présenté ainsi, cela peut sembler froid et distant, déjà vu ?
Mais ce roman est d’une richesse incroyable dans l’écriture comme dans le récit.
Jamais les émotions ne sont exprimées de façon directe, tout est délicatement suggéré à travers des métaphores ou la narration de petits événements. L’expression des sentiments les pires est avouable tant le personnage est attachant dans ses maladresses et ses doutes.
Bien sûr, il n’est pas seul mais les autres personnages sont relégués au plan secondaire plus proche du décor que de l’action.
Références à des lieux, à des évènements historiques, à des situations économiques, à des auteurs parfois simplement cités mais suffisamment pour donner plus de « solidité » à la construction.
D’aucuns sortiront grandis et d’autres se poseront à nouveau la question du sens.
Ne vous attachez pas aux premières pages, laissez-vous happer par ce récit et acceptez l’idée que parfois il faut se laisser porter par les évènements sans essayer constamment de justifier ses choix.
Un roman découvert dans le cadre du partenariat avec les Chroniques de la rentrée littéraire
comme dit Lacan, la femme ça n’existe pas, mais un père comme il dit
aussi, c’est-y toujours de père en pire? Y a pas de reproduction, jamais,
heureusement;-)