Cette chronique sera forcément moins riche que ne l’était celle ayant trait aux personnages. Pourtant, le lieu – au même titre parfois que la météo – est un acteur important du roman : il suffirait, pour s’en convaincre, de (re)lire La Route, de Cormac Mac Carthy, ou les romans de Jules Verne (L’île mystérieuse ?), parmi tant d’autres…
Là encore, tout est possible : lieu unique ou lieux multiples, lieux imaginaires ou réels. Chaque choix a sa signification, et va contribuer à créer dans le chapitre, dans la scène, une atmosphère particulière, qui va de plus varier suivant le personnage que l’écrivain va utiliser pour décrire son environnement. Le regard porté sur un endroit familier, connu presque par cœur, sera forcément différent de celui porté sur un endroit nouveau, à plus forte raison s’il rappelle de mauvais souvenirs.
La force des détails, l’attention portée à telle ou telle chose, tout rentre en ligne de compte. Le but est autant de mettre le lecteur en pleine immersion (par l’utilisation des cinq sens), que de fournir des éléments qui, parfois noyés dans la masse des informations, pourra faire avancer l’intrigue.
Sur mon premier roman, je m’étais « contenté » – le terme n’est pas excessif – de circonscrire l’action dans le département, sur des lieux que j’avais tous vu ou visité, et pour certains – plus rares – que j’avais imaginé ou déplacé de leur localisation véritable. C’était plus sécurisant pour moi, même si c’était aussi s’imposer des limites que j’aurai pu dépasser.
Dans ce roman-ci, l’action se répartit entre plusieurs continents (au moins deux), et dans une multitude de lieux dont certains me sont totalement étrangers. N’ayant pas la possibilité de voyager vers toutes les destinations réelles pour véritablement m’en inspirer dans le détail, j’ai recours à des solutions de substitution : la télévision, évidemment, et surtout Wikipédia et Google Earth. La combinaison photos, vidéos, plans et explications permet, je l’espère sans trop se tromper, de restituer l’atmosphère et le sens que je veux donner à chacun de ces lieux. Ce sont des compléments intéressants, et qui facilitent grandement le travail.
Et puis il y a, bien sûr, la part d’écriture « automatique », quand, devant la feuille (ou l’écran), vous vous trouvez en proie à un problème précis, et la solution surgit sur l’instant sans que vous l’ayez réfléchie au préalable. La préparation, finalement, ce n’est qu’une toute petite partie du travail. Elle ne couvre qu’une partie du résultat final.
Où en suis-je ?
Je suis sur le point d’en terminer avec la première partie, au bout de cent trente pages, avec trois chapitres qui sont autant de rebondissements et devraient laisser le lecteur en attente de la suite. Sur cette première phase, l’action était principalement concentrée sur quatre jours, alors que la suivante démarre cinq ou six jours plus tard.
Avant d’attaquer sa rédaction, il faut que je me re-penche sur mon canevas pour m’assurer de la cohérence de l’ensemble et réorganiser la suite.
Je n’ai déjà plus qu’un vague souvenir de mes premières pages, que je redécouvrirais plus tard au moment d’entreprendre le second jet. Elles commencent à peser sur mon esprit, parce que j’ai déjà une petite idée du chantier que j’ai laissé derrière moi. Des chapitres à retravailler, quelques répétitions d’un chapitre à l’autre, des personnages peu utilisés…
J’ai commencé l’écriture il y a plus de six mois, avec des phases plus ou moins intenses. J’en ai au moins pour quatre mois encore. Plus le temps passe, et plus je crois que je vais boucler le premier jet avec l’énergie du désespoir, au cœur de l’été, au prix d’une épreuve d’une violence physique et psychologique terrible, mais complètement libératrice : quelques journées ou quelques nuits où les pages sortiront par dizaines jusqu’au point final. Sur mon premier roman, les cinquante dernières pages (soit un cinquième du roman) avaient surgi en un seul jour, au terme d’un marathon de huit heures.
Notre prochain rendez-vous aura lieu fin juin, début juillet. La chronique portera peut-être sur les outils d’aide à l’écriture, à moins que je ne vous propose un débat sur la source du besoin d’écrire. Avez-vous une préférence ?
Les deux propositions sont d’égal intérêt mais quand même, ce qui me questionne personnellement, c’est bien la mise en marche du processus d’écriture…
Après tout, nous aurons tout le temps de débattre le jour où je me serais totalement dévoilé…
😉
J’ai bien aimé également l’intérêt du choix des lieux où évolueront les personnages. Pour le dernier épisode, effectivement, cette envie, ce besoin d’écrire, çà nous titille de tout savoir. Alors, merci pour tous ces éclairages sur votre travail et au prochain article.
Il va être difficile de faire plaisir à tout le monde en même temps. La prochaine chronique s’intitulera « Devant la première page blanche » (parution en fin de semaine prochaine).
Nous verrons les outils d’aide à l’écriture et la source du besoin d’écrire plus tard dans l’été, ou à l’automne.