auteur, illustrateur: Wolf Erlbruch, traduit de l’allemand par Daniele Ball
edition:la joie de lire
Classé album pour enfants de plus de 6ans, cet ouvrage aborde tranquillement le thème de la mort.
Pas la mort brutale, la mort injuste, non, la mort, naturellement. D’une manière délicate.
Les personnages sont dessinés subtilement tout en hauteur, étirés, sur des pages d’un crème un peu doux.
La mort a l’allure de la vieillesse et de l’enfance, avec un visage, ou plutôt un crâne, presque attendrissant, elle sourit avec une expression énigmatique qui m’a fait penser à La Joconde.
Au travers des dialogues entre elle et le canard sont abordés les thèmes de la peur, de l’au-delà, de l’inéluctable, de la fin, sans jamais apporter de réponse . Ce n’est ni inquiétant ni rassurant.
Les tons de gris et de beige reflètent quelque peu la froideur de l’évènement mais des touches de jaune pour les pattes et le bec du canard, du rouge pour le jupon de la mort, réchauffent un brin l’ensemble; le violet de la tulipe nous laisse perplexe.
Comme le canard, nous sommes incrédules sur la suite de l’histoire; le canard joue au trompe-la-mort, au brave-la-mort, va même jusqu’à la réchauffer après son bain dans la mare. Un air de dire « peut-être pas moi? ».
Mais,pas de veine illusion, la mort est là depuis sa naissance lui affirme-t-elle.
Elle le tranquillise, elle lui dit que lorsqu’il sera parti, l’étang n’existera plus non plus, puisqu’il n’existera plus pour lui.
Les dernières pages changent de couleur: au crème se substitue le ? bleu-canard ? bleu-nuit ! bleu- des -flots- profonds..quand la mort le confie au fleuve, elle dépose sur lui, la tulipe, le lien entre la vie et le trépas pour son voyage vers l’autre rive. Un peu de culpabilité dans le regard de la mort qu’il avait réchauffée. Elle le suit du regard jusqu’où?
Les liens nécessitent de se balader un peu pour retrouver la bibliographie complète, avec critiques, des autres livres de Wolf Erlbruch; occasion aussi de saluer au passage l’excellent travail du comité de lecture des bibliothécaires jeunesse du 93, « Livres au trésor » – et ouvertures sur leurs sélections annuelles, précieuses pour les acquisitions en bibliothèque !
Un album mortel, je confirme!