L’HYVER DES ALPES
Ces atomes de feu qui sur la neige brillent,
Ces estincelles d’or, d’azur et de cristal
Dont l’hyver, au soleil, d’un lustre oriental
Pare ses cheveux blancs que les vents esparpillent;
Ce beau cotton du ciel dequoy les monts s’habillent,
Ce pavé transparant fait du second métal,
Et cet air net et sain, propre à l’esprit vital,
Sont si doux à mes yeux que d’aise ils en pétillent.
Cette saison me plaist, j’en ayme la froideur;
Sa robbe d’innocence et de pur candeur
Couvre de quelque façon les crimes de la terre.
Aussi l’Olympien la void d’un front humain;
Sa collere l’espargne, et jamais le tonnerre
Pour désoler ses jours ne partit de sa main
Marc-Antoine Girard deSAINT-AMANT (1594-1661)
(Seconde partie des Oeuvres poétiques, 1643)