Les Vieilles, Pascale Gautier
Ed. Joëlle Losfedl
Le Trou, village du sud où il fait bon vivre, le ciel est toujours bleu, et c’est pour cette raison que la majorité des habitants sont âgés de 60 ans et bien au-delà.
La plupart étant des femmes, d’où le titre les Vieilles.
Entre celle qui, veuve très tôt, n’a jamais souhaité refaire sa vie, celle dont le fils vit à quelques kilomètres, mais qui ne supporte pas sa belle fille, celle qui a passé sa vie à prendre soin de ses parents et qui à 60 ans, après leur mort, achète un logement dans une résidence pour personnes âgées, celle qui n’a d’autres occupations que l’apéritif et le scrabble, celle qui tourne en rond dans son appartement sans voir le jour et craint les voleurs…
Voici les principaux protagonistes de ce roman.
Dans la première partie on les découvre dans leur vie, leurs manies, leurs réflexions sur leur descendance, leurs regards sur les actualités, leur critiques sur leur congénères, et avant tout leur super envie de vivre malgré l’ennui, les douleurs, les corps usés…
Et une chance pour moi, car j’avais du mal face à ces vieilles (vive le mélange des générations) arrive Bonvent, un astéroïde qui menace de s’écraser sur terre voir même sur Trou dimanche prochain. Est-ce une bêtise comme le pensent certaines, ou la fin du monde selon d’autres, enfin les voilà confrontées à leur fin proche, et dans ces moments là que faire ? Se rapprocher des siens, se renfermer seule et voir sa pauvre vie défiler et se rendre compte qu’on en a rien fait…, se suicider,…
Des tableaux amusants:
une vieille qui se trouve encore irrésistible et qui n’hésite pas à prendre pour amant le jeune Kevin employé du crématorium qui de son côté est très attiré par les « vieilles »
« Les vieilles sont émouvantes. La vie les a malaxées triturées brisées. Elles portent l’empreinte de la mort. Elles sont déjà de l’autre côté et se rapprochent à ce qu’elles peuvent. C’est pour ça qu’elles sont si souvent insupportables. »
Une autre qui se soûle au porto en soutien-gorge…
Un nonagénaire » Pierre Martin, auréolé de gloire dans son short bleu.. « , toujours irrésistible qui séduit Nicole de quarante ans sa cadette.
Un prêtre qui perd la foi…
Une petite rengaine qui revient…
« on dirait des cigales qui, dans le bois, sur un arbre, font entendre leur voix charmante »
J’ai beaucoup aimé la deuxième partie, le ton parfois acerbe qu’emploie l’auteur pour décrire le comportement des personnages face à leur destin, face à la mort . L’humour aussi lorsque Nicole la plus jeune des vieilles se retire sous la table de son salon avec un bloc de foie gras et une bouteille de Jurançon, en considérant la table rustique, héritage de famille comme seul rempart face à l’astéroïde.
A la fin de ma lecture voilà ce qui m’est venu en tête » faut-il pleurer, faut-il en rire, fait-elle envie ou bien pitié, je n’ai pas le cœur à le dire, on ne voit pas le temps passer », Jean Ferrat.
Pascale Gautier est directrice littéraire chez Buchet Chastel, auteur de huit romans dont « trois grains de beauté » aux éditions Joëlle Losfeld, qui a reçu le grand prix de la SGDL.
Un livre déroutant au premier abord …. Une chronique douce amère sur la vieillesse au travers quelques veuves très « typées » à défaut d’être très « typiques »
Le propos est souvent caustique mais l’humour en adoucit la lecture.
Ces vieilles sont parfois odieuses mais toujours attachantes car elles sont désabusées, fragiles et terriblement seules dans cette ville peuplée presque exclusivement de femmes âgées.
A lire … en se promettant de ne jamais les imiter !
Un livre parfois désespérant, parfois plein de vie (malgré l’âge des protagonistes), où l’humour l’emporte souvent et permet au lecteur de garder une distance par rapport à cette vieillesse d’où l’amour est souvent absent. C’est peut-être ce qui m’a le plus interpelé, les sentiments semblent totalement oubliés chez ces « vieilles ». J’ai pourtant apprécié cette lecture, qui de toute manière ne laisse pas indifférent, et vous fait passer de l’indignation à la compassion, en passant par l’indulgence, l’amusement, l’agacement…
En tout cas je suis d’accord avec Annick… j’espère ne jamais leur ressembler !