Vaches sacrées…sacrées vaches ! 1


cornesL’héroïne de ce roman est une vache, pas n’importe quelle vache, une vache voyageuse (qui a des pensées secrètes aussi) que son chemin va amener près du village de Nandgaon. Ce village a une particularité : aucune route ne permet d’y accéder, seul un bateau assure le lien avec les villes les plus proches. Et il n’y a ni eau, ni électricité. Le chef de Nandgaon, pour le bien de la communauté, refuse toute forme de progrès. Chaque jour, il reçoit les villageois, les conseille, les accompagne comme un père. Le chef  Gopal qui jusqu’à présent régnait, sans se l’avouer, en seigneur et maître sur le destin de chacun des habitants et du troupeau, réalise que l’équilibre est fragile et que garder le village hors du temps pour le préserver n’est pas si simple.

Dans ce village, Ramu , le plus démuni de tous les habitants, épouse par le biais d’un mariage arrangé une jeune fille, Lakshmi, qui a fait des études supérieures.

Ramu et sa femme vivent humblement un peu à l’écart du village, et sont nourris par le chef de la communauté. Un jour, Ramu, en faisant paître le troupeau de chèvres du chef découvre une vache errante, dont il va tomber « amoureux » au désespoir de sa femme.

Au même moment, un institut le KIRD (Institut pour le développement rural) travaille sur un programme de développement de l’insémination artificielle afin de permettre aux villageois les plus pauvres de subvenir à leurs besoins en produisant plus de lait grâce à des vaches hybrides. A cette fin, ce laboratoire recrute des stagiaires dont une des missions est de parcourir la campagne afin de convaincre les paysans de laisser inséminer leurs vaches.

Manoj Mishra est l’un d’entre eux. Il est rentré grâce à l’aide de son beau-père et a intégré l’institut avec sa femme Pratima, épousé dans le cadre d’un mariage arrangé. Au cours de sa formation, il tombera sous le charme d’un taureau Govinda qu’il décidera d’emporter avec lui à l’issue de sa formation.Il s’installera à Khandwa et y créera sa propre entreprise d’insémination.   Tout en se faisant, il parcourt la campagne à la recherche de vaches fertiles, mais la tâche est ardue et les paysans pas faciles à convaincre.

C’est ainsi qu’il croisera la route de Lakshmi et sa junglee. Cette pauvre vieille vache vagabonde donnera quelques mois plus tard naissance à un monstre, une vache noire et blanche au museau écrasé. Cette intruse va provoquer beaucoup de remous au sein de la communauté.

En grandissant , elle se met à produire du lait, beaucoup de lait, et rapporter de l’argent à  Ramu. Lakshmi, commence à prendre sa revanche sur les villageois et ne s’arrête en si bon chemin. Elle décide de faire inséminer cette vache « monstre », qui donnera quelques mois après naissance à un magnifique taureau noir.

Le village n’acceptera pas pour autant Ramu et sa femme . Le combat va s’engager entre Lakshmi ,qui revendique le droit aux femmes à s’occuper d’autre chose que de la maison,  l’ouverture au reste du monde et de fait à la modernité ,et le chef qui souhaite préserver les traditions et conserver le village hors du temps.Si le rapport de force s’établit entre les hommes, il se matérialisera par un mise en rivalité du taureau de Lakshmi et de la vache du chef. Le combat sera inévitable.

Radhika Jha nous décrit un pays partagé entre tradition et modernité. Une Inde où doivent cohabiter croyances ancestrales et progrès. Elle montre le décalage entre la science qui peu à peu gagne du terrain et le monde rural qui doit parfois lutter contre la nature et n’accepte pas cette science comme une solution, ce monde rural constamment partagé entre son attachement aux traditions y compris dans l’organisation de la société et son besoin de se moderniser pour survivre. Sans être misérabiliste, le récit ne cache rien de la pauvreté qui sévit , ni même des problèmes sociaux (alcool, drogues, maladies,…) qui touchent une part importante de la population. Un récit épique dans lequel l’Inde des couleurs et des parfums n’est pas oublié. Une Inde, qui une fois de plus, pointe sa singularité.

Le texte est rythmé et parfois même humoristique. Les situations critiques sont décrites sans détour ,et quelques phrases qui semblent empreintes d’une certaine légèreté n’en dénoncent par moins des situations dramatiques.

Des lanternes à leurs cornes attachées / Radhika Jha .-Editions Philippe Picquier, 2011. -565 p.


Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

+ 89 = 99

Commentaire sur “Vaches sacrées…sacrées vaches !