Guise (Aisne) – 5 000 habitants – aux confins de la Thiérache – Saviez-vous que Camille Desmoulins, journaliste proche de Robespierre, y est né en 1760 ? Mais ce n’est pas de Révolution Française dont je veux vous parler mais plutôt de révolution industrielle et d’utopie réalisée.
Guise, donc, et sa manufacture de poêles, les Godin… Ou comment le rêve d’un homme en une société plus juste prend réalité… Autodidacte et entrepreneur, nourri des lectures de Fourier, Godin choisit d’expérimenter un nouveau mode d’organisation sociale en imaginant et créant le Familistère en plein XIXème siècle, mettant en oeuvre les idées qu’il a développées dans Solutions Sociales.
Travail, solidarité, équité, liberté et devoir sont au cœur même de cette invention. Tous les aspects de la vie quotidienne (laborieuse, sociale, culturelle, éducative,…) sont pris en compte dans la création de cette société « idéale » : locaux d’habitation clairs et salubres (le Palais social, certes à l’allure quelque peu carcéral), nourricerie-pouponnat (où les petits sont accueillis dès l’âge de 15 jours), bibliothèque publique, théâtre et kiosque à musique ainsi qu’un lavoir-pisicine (avec fonds amovible qui permet l’apprentissage de la natation à ceux qui ne savent pas nager), jardins familiaux : tout est pensé et mis en place dans un objectif d’épanouissement individuel et collectif de la personne et une ambition architecturale forte. Godin lui-même s’y installe avec sa compagne et va jusqu’à déshériter son fils pour créer, en 1880, l’Association coopérative du Capital et du Travail dans laquelle chaque habitant a sa place et son mot à dire, et qui perdurera jusqu’en 1968.
Depuis 2000, un projet de valorisation de ce patrimoine social et architectural est en oeuvre, soutenu par des collectivités publiques et privées.
Un lieu vraiment étonnant et passionnant à découvrir. Une bibliothèque et une librairie enthousiasmante. N’hésitez pas à faire le déplacement !
Pour ceux et celles qui ne pourraient se déplacer aussi loin au Nord (par crainte de froidure et d’engelures) vous pouvez toujours découvrir ce lieu via une bande dessinée : « De briques et de sang » (scénario de Régis Hautière et dessins de David François, éditions KSTR). En 1914 un meurtre est commis dans l’enceinte du Familistère… bientôt d’autres suivront. Victor Leblanc, journaliste à L’Humanité, aidé par Ada, une habitante de ce lieu étrange, mène l’enquête. Intrigue policière bien tordue, contexte historique qui ne l’est pas moins (revendications sociales, assassinat de Jaurès… début de la guerre) et découverte du Familistère de Guise forment les trois trames fortement imbriquées de cette passionnante et instructive BD.
Moins loin de chez nous, il y a également les Salines royales d’Arc et Senans dans le Jura
Un lieu magnifique également. A découvrir http://www.salineroyale.com/index.php?option=com_frontpage&Itemid=1