« Résister, il faut le conjuguer au présent » : témoignages (suite) 2


Nous proposons dans cet article la suite des interviews de Pierre Ferdonnet, Ginette Sochet et Maurice Renaudat.

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Quelle a été votre implication dans la résistance à cette période ?

GS : On écoutait la BBC quand on pouvait. Déjà à  l’école, on prenait des craies et lorsque nous allions au théâtre, on inscrivait des V (signe de Victoire)  sur les murs. Plus tard, je travaillais au Ravitaillement général. Je voyais passer les bons de réquisition de l’armée allemande. Un collègue de travail m’a demandé de recopier ces bons. Je les lui transmettais ensuite et lui-même les adressait à Londres (cela permettait de déterminer les différents mouvements de l’armée allemande).

MR : Révolté tout au long de ma vie (mon père était membre d’un comité de révolution espagnole), j’ai été marqué par l’exécution d’un camarade au Mont Valérien. J’ai été sollicité pour constituer un groupe parmi les jeunes qui tentaient d’échapper au travail obligatoire en Allemagne (STO) en se cachant dans les chantiers forestiers. Notre objectif était de distribuer dans les fermes des tracts ou des journaux qu’on allait chercher à Vierzon. Par la suite, nous avons été chargés de la récupération des parachutages d’armes qu’il a fallu cacher.

PF : On réalisait des tracts à partir des imprimeries d’enfants. Ils étaient imprimés un par un. Cela durait des nuits entières. La nuit, on faisait aussi des inscriptions sur les murs.

X.L. : Au musée, on retrouve l’existence de ces faits grâce aux procès verbaux et à la récupération de tracts par la police et la gendarmerie de l’époque.

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Quelles ont été les conséquences de ces activités ?

GS : J’ai été arrêtée le 19 janvier 1944 par Paoli (français qui travaillait à la perception et qui s’était mis à la solde des allemands) suite à l’arrestation de mon contact. Ils m’ont emmené à  la gestapo, interrogée en me montrant les preuves. Je suis restée 8 jours à la prison du Bordiot à Bourges, puis transférée à Orléans, ensuite à Fresnes.. J’ai été déportée à Ravensbrûck puis à Zwodau (Tchéchoslovaquie) où nous avons été libérés par les Américains le 8 mai 1945. Je n’ai appris le nom du réseau de résistance dont je faisais partie que 60 ans plus tard.

PF : J’étais dans le maquis de Corrèze. On était chargé de ravitailler les autres groupes. On a été dénoncés par le frère d’un de nos camarades, puis arrêtés à notre camp de base par les SS, en septembre 1943.  Emmenés à la gestapo de Limoges où nous avons subi des interrogatoires très durs, puis transférés à Fresnes pour 6 mois. Déporté à Auschwitz-Birkenau, puis à Buchenwald et ensuite à Flossenburg, j’ai continué à faire du sabotage : on avait fait alliance avec nombre de camarades prisonniers allemands. Je suis revenu en France le 19 mai 1945.

MR : Après le débarquement du 6 juin 1944, le Cher devient un immense maquis pour les opérations de sabotage. Le Cher est un couloir de passage de l’armée allemande stationnée dans le sud ouest qui regagnait l’Allemagne (plus de 100 000 allemands). On estime à plus de 400 attentats sur le mois d’août 1944. J’ai participé à l’anéantissement des poches de résistance allemande à la Rochelle puis à Royan.

X.L : Ces évènements sont retracés au Musée grâce à des témoignages et à des objets rapportés des camps.

L’assemblée a ensuite été invitée à poser des questions:

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Comment avez-vous gardé l’espoir ?

PF : On l’a toujours eu – l’impression que la France ne serait pas toujours occupée – il fallait chasser les allemands.

GS : Dans les camps on était persuadués qu’on s’en sortirait.

MR : J’ai repris espoir quand Hitler a décidé d’attaquer la Russie. J’ai pensé à Napoléon 1er. Il y a eu ensuite le débarquement des alliés en Afrique du Nord en 1942.

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Comment la résistance était-elle perçue dans les années 1941 à 1943 ?

MR : Il valait mieux ne pas dire qui on était. Il y avait à peu près 6500 résistants dans le Cher sur 300 000 habitants.

GS : Le retour des camps ne s’est pas très bien passé. On n’a jamais parlé de la déportation car on avait le sentiment que personne ne pouvait nous croire.

Si vous n’aviez pas été résistants à cette époque, comment l’auriez-vous vécu plus tard ?

MR : Cela m’a permis de construire ma vie autrement. J’avais peu de perspectives d’avenir, cela m’a ouvert d’autres horizons.

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Ces articles ont été réalisés par : Vincent, Maryse, Jacqueline, Michèle, Daniel, Roger, Virginie, Dominique G, Martine L, Thomas, Christine P et Christine L.

Vous pouvez égalemet retrouver un reportage sur ces rencontres en cliquant ici.


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