Fugue de Anne Delaflotte Mehdevi. Editons Gaïa.
Clothilde et Vincent vivent avec leurs quatre enfants, une vie d’équilibre de bonheur jusqu’au jour de la rentrée scolaire.
La sonnerie du téléphone dans l’espace lumineux de Clothilde provoque un séisme.
La maîtresse annonce à Clothilde que Madeleine a disparu. En un instant tout bascule.
Leur petite fille de 8 ans s’est échappée de l’école par une fenêtre ouverte…
Aussitôt Clothilde part à sa recherche, elle l’appelle, crie, hurle son nom pour la retrouver saine et sauve au bord de la rivière.
Mais Clothilde a perdu sa voix.
Mais Clothilde sur le chemin de la rééducation trouve le chant.
Elle suit une rééducation avec une orthophoniste, mais le travail est long, laborieux et sa voix ne revient pas, elle reste atone, basse,murmurée. Il lui faut alors trouver un nouveau mode de communication et faire face aux incompréhensions de tous qui ne comprennent pas cette maladie (qui n’en est pas une, pour eux) qui ne comprennent pas que cette femme parfaite, lisse, aux services de tous, solide, puisse se révéler fragile et surtout elle ne leur renvoie plus l’image qu’ils attendent d’elle.
C’est un roman en mouvement, celui de la musique, lent, rapide, en aller retour de pertes,
de retrouvailles, d’avancées, d’échecs, en suspension entre des moments de silence, de bruit et de chant.
Des apnées où la parole perdue ne vient plus, mais le souffle et l’air reviennent comme une évidence avec le chant, celui libérateur que Clothilde découvre avec un professeur de musique.
Atypique cette femme qui en refusant les traitements chimiques doit s’opposer à tous, mais qui se lance corps et âme dans ce chant qui l’apaise.
« Affirmer sa voix, c’est s’affirmer femme » et non pas seulement épouse, mère aux services des autres, affirmer sa voix, c’est trouver sa propre voie, se construire un avenir riche, c’est rebondir, se remplir de notes, de vibrations, de résonances, redresser ce corps malmené par les maternités successives.
Clothilde bascule vers nous, plus encore présente au moment du concert qu’elle donne dans une abbaye. Parce que le chant est aussi don de soi, elle réussit sa quête pour elle-même et pour les autres.
Elle renaît après la fugue, catalyseur ; à la fois point de départ et fin.
Ce n’est pas un livre qu’on lit, c’est un livre qu’on écoute.